Le RezoAnimation Faber Mazlish est un réseau mondial d’animatrices/teurs dédié à aider les parents et les enseignants à améliorer la communication avec les enfants et les adolescents.
À l’aide d’une approche développée par Adele Faber et Elaine Mazlish, les animatrices/teurs organisent des ateliers et conférences pour parents, enseignants, et professionnels sur les sujets suivants: « Parler pour que les enfants/ados écoutent », « Frères et soeurs sans rivalité » ou « Parler pour que les enfants apprennent, à la maison et à l’école ».
La méthode Faber/Mazlish consiste simplement à guider des groupes à travers les différents exercices et mises en situation qui sont proposés pour accompagner et aider à faire des prises de conscience par rapport aux habitudes de communications existantes. Cette méthode permet aussi de faire l’expérience de pratiques nouvelles et de découvrir des pistes qui vont dénouer des situations familiales pénibles à l’aide d’exercices et de jeux de rôles.
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Les animatrices/teurs et
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se trouvent dans plusieurs régions
de la francophonie mondiale
Ateliers et conférences
La découverte de ces outils concrets permet de porter un regard neuf sur l’enfant/l’ado et constitue un soulagement réel pour les parents et les enseignants ou tout autre professionnel qui travaille avec les enfants/ados!!
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autour de notre rôle d’animateur/ice.
Soutien, entre-aide et questionnements au sujet
de l’animation et de l’approche Faber-Mazlish.
Témoignages
Témoignage d’une enseignante :
Rentrée 2013 : Je suis sur le point de jeter l’éponge. Je ne veux plus enseigner : c’est trop dur, je suis épuisée. Le bruit des enfants, leurs sollicitations permanentes, leur agitation, leur manque de concentration attaquent mes nerfs. J’ai le sentiment que l’école brise peu à peu ma vie. Je suis aux prises avec une urgence vitale.
Octobre 2013 : J’arrive dans l’atelier “ Parler pour que les enfants écoutent, écouter pour que les enfants parlent”, avec l’espoir de la dernière chance. Je veux comprendre ce qui se joue dans nos échanges quotidiens. Je veux apprendre pour changer, agir et ne plus subir.
Témoignage de Caroline Marcon, enseignante en Nouvelle-Calédonie
Au commencement…
Il y a 10 ans, j’ai commencé mon métier d’enseignante d’élèves de première année. Quelle pression sur mes épaules! Sans parler des parents inquiets qui confiaient leur précieux enfant à une nouvelle enseignante. Mais j’étais pleine d’enthousiasme, émerveillée par les capacités des enfants à apprendre.
Au début de ma carrière, dans une classe, un enfant ou deux bougeait beaucoup, avait des attitudes « parasites » qui consumaient toute mon énergie. Et puis, des phénomènes de violence en tous genres sont apparus, d’abord ponctuels et dispersés, puis de plus en plus nombreux, fréquents et réguliers… Je comprenais que mon métier n’était pas seulement d’enseigner du savoir, qu’il fallait aussi s’intéresser au savoir-vivre, au savoir-être et à l’être, tout simplement.
J’ai d’abord éprouvé de la sympathie, de la pitié pour tous ces élèves, mais que pouvais-je faire ? Soigner ponctuellement un bobo, téléphoner à un parent et puis accepter tout le reste comme une fatalité. Intérieurement, j’étais révoltée, et cette révolte s’est tournée vers le système éducatif. Ce fut peine perdue, le système est tel qu’il est impossible d’aller à l’encontre au risque de mettre en jeu sa carrière, au risque de paraître trop marginale…
Quelques années après, je mets au monde un petit garçon. Je ne suis plus seulement professeure, je suis aussi maman. J’apprends mon métier de maman avec mon conjoint, mais en ayant l’impression d’être un peu comme en classe et de tout mélanger, tantôt aimante et bienveillante, pleine d’amour ; tantôt fatiguée et irritable, étouffée, trop sévère… J’apprends à jongler entre mon enfant et mes élèves.
Et la routine du quotidien vient boucler mes journées en me faisant oublier l’essentiel…
Jusqu’au moment où je prends réellement conscience que ça n’a plus de sens, je suis maman et je consacre 99% de mon énergie en classe. J’ai compris que les élèves changeaient au fil des années. J’ai commencé à vraiment me questionner sur d’autres « solutions » ou « démarches » pour aider les élèves et pour m’aider moi-même.
J’ai aussi pris conscience des limites de ma formation initiale et des limites des interventions du réseau d’aide de l’école. J’ai également eu le sentiment qu’il fallait « faire la classe » autrement…
Le début de ma nouvelle façon de voir ma carrière…
En juillet 2015, j’ai assisté à une conférence ouverte au public. La salle était presque vide : une poignée de parents et 5 enseignantes (sur 7) de mon école. Pendant la conférence, j’ai entendu une phrase qui résonne encore aujourd’hui dans ma tête : « Un enfant qui se sent bien se comporte bien ». Je suis tout de suite emballée, le sujet m’interpelle. À la fin de la conférence, je consulte les ouvrages exposés. À la lecture des sommaires, je me sens habitée par l’envie de lire ces livres au plus vite. Je décide d’acheter « Parler pour que les enfants apprennent à la maison et à l’école » d’Adele FABER et Elaine MAZLISH.
Pendant trois mois, dans ma classe, je me suis exercée aux habiletés proposées. En suivant la démarche de ce livre, je constatais rapidement que ça fonctionnait, même si la mise en place de ces habiletés n’était pas encore automatique pour moi. En effet, la démarche impliquait des changements dans ma façon de parler, de penser et de réagir ; j’ai vu qu’il s’agissait d’une réelle « gymnastique » qui nécessiterait beaucoup d’entraînement.
Mais, c’était parti pour une belle aventure !
L’atelier, un vrai remue-méninge
Et puis, on nous a offert de participer à un atelier sur cette même approche ayant pour thème : Parler pour que les enfants écoutent, écouter pour que les enfants parlent. Si riche en savoir-faire et en savoir-être, j’ai été touchée en profondeur au niveau des émotions qui ont émergé face aux prises de conscience parfois violentes qui m’arrivaient en pleine figure. Ce fut une remise en question globale en tant que femme, que mère et enseignante. En fait, c’était exactement ce que j’attendais, ce qui me manquait depuis le départ, ce que j’aurais voulu connaître dès le début de ma carrière.
Les rencontres étaient intenses et riches et bousculaient mes idées reçues. J’en ressortais en me rendant compte des erreurs commises… Parfois heureuse grâce aux habiletés apprises, parfois bouleversée par les mises en situation qui aidaient à se mettre dans la peau de l’enfant et grâce à tous ces échanges et discussions entre nous.
À la fin de chaque rencontre, je rentrais avec des « devoirs à faire » : le but étant d’essayer une nouvelle habileté (à la maison ou en classe) et de les noter par écrit dans le cahier de travail qui accompagne le livre. Une réelle envie de me remettre en question, d’essayer, et surtout d’y arriver m’envahissait. En bonne élève assidue, je faisais mes « devoirs », avec des réussites et des échecs… Mais la motivation était au rendez-vous!
Voici les habiletés qui ont été abordées au cours de cet atelier:
1-aider les enfants aux prises avec leurs sentiments (accueillir et respecter tous les sentiments de l’enfant)
2-Susciter la coopération (décrire ce que l’on voit ou le problème, donner de l’information, le dire en un mot, décrire ce que l’on ressent, écrire une note)
3-remplacer la punition (exprimer ses sentiments, ses attentes, montrer comment redresser la situation, offrir des choix, passer à l’action, utiliser la résolution de problème)
4-encourager l’autonomie (offrir des choix, respecter ses efforts, ne pas poser trop de questions, ne pas se presser de répondre, encourager l’enfant à utiliser des ressources, ne pas supprimer l’espoir)
5-utiliser les compliments (décrire ce que l’on voit, ce que l’on ressent, résumer en un mot le comportement digne de louanges)
6-aider les enfants à se dégager des rôles qui les empêchent de s’épanouir (saisir les occasions de lui présenter une nouvelle image de lui-même, lui permettre de se voir d’un œil différent, lui donner l’occasion de vous entendre dire des choses positives à son sujet, donner vous-même l’exemple du comportement attendu, mettre en évidence ses bons coups, exprimer vos attentes si son ancienne image de lui resurgit).
J’ai terminé l’année 2015 avec l’intention de démarrer l’année 2016 en mettant réellement en place toutes ces habiletés dès la rentrée des classes et de poursuivre ma formation. Quel programme ! Et ça marche !
Au mois d’octobre 2016, Roseline ROY vient du Canada pour animer cet atelier. Cette fois-ci, la formation a été condensée et planifiée pour répondre à la forte demande des participants. Deux groupes de 16 participants sont organisés, à raison de 3 jours par groupe, et ce, pendant les vacances scolaires. Une fois encore, cette formation était ce que j’attendais : la confirmation que j’étais sur la bonne voie, un rappel des habiletés afin de ne pas s’égarer, l’apprentissage de nouvelles habiletés, de nombreux échanges avec des parents enseignants, l’envie de continuer et d’essayer pour les enfants qui me sont confiés, pour moi-même et pour ma famille.
Et une fois de plus, je suis touchée droit au cœur lorsque j’ouvre le nouveau livre, Parler pour que les enfants apprennent, touchée par une citation du psychologue Haim Ginott : « Par leur façon de parler, les parents et les enseignants renseignent l’enfant sur les sentiments qu’ils éprouvent à son égard. Leurs paroles influencent son estime de soi et le sentiment qu’il a de sa valeur personnelle. Dans une large mesure, leur langage détermine son destin. »
Et cet atelier a vraiment mis en évidence les conséquences puissantes, qu’elles soient positives ou négatives, que peuvent avoir un regard, un geste, un mot, une phrase, un appel téléphonique, un message écrit…
L’atelier, Jour 1 :
Roseline nous met tout de suite à l’aise, parler avec elle est d’emblée facile… Cela fait 25 ans qu’elle pratique cette méthode, qui est devenue naturelle, voir un art, selon moi. Ayant participé à un atelier l’an passé, et étant en présence de personnes découvrant pour la première fois la méthode, j’essaie de ne pas trop intervenir dans les conversations, échanges et remue-méninge des premiers exercices. J’observe les attitudes des unes et des autres, tantôt sceptiques ou fermées, ouvertes ou pensives. Toutes, nous avons constaté que nous faisions des erreurs en classe, mais en pensant faire bien. Une phrase est sans cesse revenue au sein des échanges : « Ça partait d’une bonne intention ». Les habiletés de base sont présentées. Je me sens comme une ancienne élève qui révise ce qu’elle a déjà appris, qui est réconfortée et fière d’avoir essayé de mettre en place des choses en classe. Je suis assaillie de questions par mes collègues.
Roseline propose à des participantes d’animer les ateliers du lendemain en utilisant simplement le guide de l’animateur. Roseline ne pourra pas toujours être là, la mairie ne pourra pas toujours assurer financièrement. Former des ambassadeurs capables d’animer des ateliers et des groupes d’analyses de pratiques est l’objectif.
Avec appréhension, des volontaires se proposent. J’ai hâte d’être à demain.
L’atelier, Jour 2 :
Déjà à l’aise le jour 1, le jour 2 est encore mieux. Les participantes sont toujours placées en forme de cercle, mais des matelas ou tapis de yoga ont remplacé les chaises d’écoliers. Des paquets de biscuits et de bonbons circulent au long de la journée, l’odeur de l’anti-moustique embaume la pièce : nous sommes maintenant bien organisées ! Toutes les conditions sont réunies !
Mais la fatigue se fait ressentir, certaines sont comme abasourdies par la somme d’informations reçues la veille. Des premières prises de conscience émergent, des premières «claques », l’impression d’avoir mal agit en classe ou à la maison, des remords. Les volontaires animent les ateliers avec courage et facilité, le guide étant très pratique et bien écrit. Les pauses ponctuent la journée, et la mélodie de la flûte de Roseline nous rappelle à nos places pour continuer notre travail.
On aborde les principes de la résolution de problèmes avec un enfant: je suis très attentive à cet instant, car c’est le point que je considère comme mon objectif à travailler. La journée s’achève, je me porte volontaire pour animer un atelier le lendemain sur un thème tout autre.
L’atelier, Jour 3 :
Notre organisation matérielle s’améliore et nous ressentons le besoin de mettre nos corps à l’aise car les journées sont éprouvantes mentalement. Nous sommes presque toutes allongées ou assises sur des matelas, plus proches les uns des autres, s’autorisant des bavardages constructifs.
Roseline, ayant constaté notre intérêt pour la résolution de problème la veille, décide d’attaquer la matinée par un jeu de rôle : tenter une résolution de problème avec pas un, mais deux enfants ! Elle a bien compris les difficultés que nous avons à gérer les disputes au sein d’une classe nombreuse.
Je me porte volontaire avec une autre collègue avec qui j’avais travaillé en début de carrière à l’école Ohlen pour jouer le rôle des deux enfants : elle serait la plus sage qui joue tranquillement et moi, la perturbatrice créant le conflit. Ayant moi-même, au sein de ma classe, assisté à des scènes de violence qui m’avaient choqué, je voulais me mettre dans le même état que cet enfant en colère, violent, qui peut frapper ou mordre, s’enfuir, jeter des objets. J’enlève mes lunettes, mes boucles d’oreilles et ma pince à cheveux : je suis prête pour la bataille !
Nous avons joué la scène 5 fois. À chaque scène, je me suis amusée à préparer une attaque diabolique pour embêter délibérément ma camarade. J’ai été surprise des idées qui me venaient à l’esprit : attaque furtive, attaque frontale, attaque sournoise… À chaque scène, dès que la bagarre éclatait, une participante jouait le rôle de la maîtresse pour stopper le conflit, ou plutôt tenter de le faire. Les autres, perturbées par la scène, étaient choquées ou se sont mises à filmer. Il est clair que ce jeu de rôle nous a toutes profondément marquées.
Plus je devais rejouer la scène, plus je prenais du plaisir à chercher comment attaquer ma camarade, comment éloigner la maîtresse en envoyant les jouets en l’air, mes chaussures, en tirant sur les vêtements, en me roulant au sol et en attrapant des bras ou des jambes, en mordant, en me débattant ! J’ai ressenti l’impuissance de la maîtresse, la peur et l’envie de fuir de ma camarade. À chaque scène, j’étais essoufflée, je transpirais, je tremblais… J’ai constaté que dans le feu de l’action, je n’ai même pas entendu la maîtresse me parler, simplement un brouhaha au-dessus de moi. J’ai constaté à quel point plus rien ne compte lorsque je suis dans un état de colère physique si violent, remplie d’adrénaline.
Lors de la dernière scène, c’est Roseline qui a fait la maîtresse. La bagarre a été tout aussi violente. Roseline est d’abord arrivée avec force (du corps et de sa voix) vers nous pour entrer en communication « Eh, les filles, les filles ! Je vois une fille qui a mal et une autre qui est très en colère. » Tout en parlant, elle se place à notre hauteur, c’est-à-dire au sol, entre nous pour nous séparer physiquement. Et elle y arrive.
Aussitôt, Roseline se place assise face à moi et ma collègue se réfugie derrière elle. Nos corps ne peuvent plus se toucher. Je suis énervée, j’ai encore besoin de bouger, je rassemble avec énervement les jouets éparpillés sur le sol lors de la dispute, j’occupe mes mains, je n’ai pas envie de parler, j’ai des palpitations. Je me tourne pour éviter le regard de Roseline qui parle à voix basse, quelques mots de temps en temps, puis des silences. Je gigote, je tente de regarder ma camarade cachée, Roseline la protège par sa posture.
Puis, je me mets à rassembler les jouets et à les placer, la tension descend légèrement. Roseline recommence à dialoguer, et se place toujours entre nous deux, mais sans tourner le dos à la camarade, comme un forme de triangle. Ainsi, nous pouvions toutes nous voir. Roseline me cherche du regard, me parle, puis tente d’instaurer un dialogue, et ce dialogue s’installe, certes non poli, mais il s’installe. Chacune finit par s’exprimer et exprimer ses sentiments. La finalité d’une résolution de problème est de trouver ensemble des solutions. La dispute étant très forte, Roseline a préféré nous proposer de jouer séparément (il aurait été impossible de jouer ensemble, vu notre état émotionnel), puis de se revoir à un autre moment pour en rediscuter.
Ce jeu de rôle a été une réelle prise conscience pour toutes, mais d’abord pour moi. J’ai senti le besoin de revoir les films, pour observer la posture des maîtresses successives, et celle de Roseline. Car dans le feu de l’action du corps, je ne savais parfois même pas quelle personne me parlait.
Je me suis mise dans mon rôle avec beaucoup de force, je le vivais avec mes tripes. Parce que je me suis vue face à des enfants dans cet état émotionnel puissant sans réussir à les calmer, essayant de les protéger physiquement pour ne pas qu’ils se blessent ou blessent un autre enfant, et ce parfois le troisième jour après la rentrée des classes !
J’ai compris que le fait de nommer le sentiment que l’on voit (ex : la colère) est une première étape, séparer /maintenir/protéger le corps est une deuxième étape. À partir de là, un dialogue peut commencer pour aboutir à des solutions.
Cette matinée nous a secoué émotionnellement. Nous avons vu à quel point la violence nous met mal à l’aise et nous rend démunies.
L’après-midi, j’anime un atelier sur le partenariat parents-enseignants. C’est un thème que je n’avais jamais abordé auparavant.
Comment parler aux parents, parler du positif, pas trop de négatifs… Que faire face à un parent agressif ? Qui suis-je pour donner des conseils éducatifs à un parent ? Il est clair que ce sujet pose problème à tous les enseignants. Le début de l’atelier commence par l’évocation de rencontres délicates ou problématiques avec un parent. Je laisse les collègues s’exprimer, puis je prends la parole.
Je me souviens que la rencontre la plus difficile pour moi fut celle où j’ai demandé aux parents d’une enfant de venir me voir pour évoquer un problème particulièrement délicat : la petite se masturbait en classe. Par précaution, j’en discute avec mes collègues qui l’avaient eu en classe les années précédentes et avec les aides maternelles, je ne me trompais pas.
Seul le papa est venu au rendez-vous (je n’avais pas évoqué le motif du rendez-vous avec les parents à l’avance). En commençant par parler du travail positif de l’enfant en classe, je tourne un moment autour du pot, puis je me lance. « Voilà, j’ai remarqué que votre enfant se touche beaucoup les parties génitales en classe… » et là, le papa répond : « je sais, elle fait pareil à la maison ». J’ai ressenti un immense (et horrible) OUF ! Il le sait déjà. Nous avons pu en discuter et convenir ensemble que j’en parlerais en classe à l’aide d’un album de DOLTO (sans viser aucun élève), que je parlerais seule à seule avec l’enfant afin qu’elle essaye de se contrôler à l’école. Son père lui en a aussi parlé pour que ces gestes restent au sein de sa chambre, son lieu privé. Et ces gestes ont diminué au fil des semaines.
Et comme nous sommes aussi des mamans, les participantes devaient faire le même travail en tant que parents lorsqu’elles ont un rendez-vous avec la maîtresse de leur enfant, la chair de leur chair. Je me suis rendu compte qu’il est difficile de parler à un parent d’un enfant « à problèmes », que les mots écrits peuvent être mal interprétés, que nous nous sentons jugés (parents ou enseignants), même quand nous pensons tous bien faire.
Ayant lu le chapitre correspondant à mon atelier, j’ai relevé et partagé quelques éléments pour améliorer ces rencontres :
– installer une table couverte d’une nappe, agrémenter de thé et biscuits…
– toujours commencer par des réflexions positives et constructives
– écouter les sentiments des parents, dire mes sentiments en tant qu’enseignante
– inviter à chercher ensemble des solutions pour le bien-être de l’enfant.
À la suite de cet atelier, je me suis dit que j’allais tenter dès que possible la résolution de problème, et que j’allais organiser mes rencontres avec les parents de façon bien différente.
L’atelier touchait à sa fin, nous étions toutes dans des états émotionnels différents et forts. Moi, j’avais la rage au ventre dans le bon sens du terme, l’envie de réussir, de continuer, d’évoluer, de partager ces expériences et ces échecs pour le bien-être des enfants, des enseignants et des parents.
Je me suis inscrite à un atelier d’initiation à la CNV (Communication non Violente) qui aura lieu le mois prochain (novembre 2016). J’ouvre mon cœur aux chemins des possibles.
Des graines ont été plantées à Païta, et elles vont germer et grandir, j’en suis persuadée. C’est pour cette raison que j’ai écrit ces expériences, constats, analyses et réflexions, pour m’en souvenir, pour voir mon évolution, pour la partager et surtout pour dire à tous ceux qui veulent bien prendre un autre chemin que c’est possible et que ça marche, même si on habite sur une petite île perdue dans l’Océan Pacifique ! C’est un langage communicatif universel.
Merci Haim Ginott, merci Mesdames FABER et MAZLISH, merci à la mairie de Païta, merci à Roseline ROY et Adrien, merci à Marie-Pierre GUIBAL, son conjoint et Sophie PELLETIER, merci à mes collègues, à ma famille, et surtout à mes élèves et leurs parents.
Comment la mise en place de la communication bienveillante d’Adele Faber et d’Elaine Mazlish permet d’installer un climat serein et durable au quotidien à la maison et dans une classe.
Témoignage de Caroline Marcon, enseignante en Nouvelle-Calédonie
Papa de 3 enfants de 15 ans, 12 ans et 8 ans (dont je m’occupe seul – une semaine sur deux – depuis 5 ans), je me suis depuis longtemps intéressé à la communication non-violente, mais je n’ai pas trouvé tout de suite une méthode simple et satisfaisante. La première fois que j’ai lu « Parler pour que les enfants écoutent, écouter pour que les enfants parlent », j’ai trouvé l’approche très claire et facile à comprendre. J’ai tout de suite commencé à l’utiliser, et très vite l’ambiance à la maison a changé… Les tensions, les disputes, les conflits ont petit à petit disparu… Malgré mon divorce, mes enfants sont épanouis, heureux, bien dans leur peau… Je ne les punis jamais, mais ils obéissent et coopèrent. Bien que la méthode soit simple, elle nécessite des ajustements importants dans la manière dont nous réagissons « instinctivement » par rapport à nos enfants, et c’est pourquoi je trouve qu’un atelier est plus efficace que la lecture du livre…
La méthode continue aujourd’hui de m’étonner… Bien qu’elle devienne rapidement naturelle dans la vie de tous les jours, il arrive encore parfois, dans des situations de crise, des moments plus conflictuels, où c’est assez tendu, que je me dise « ha, c’est le moment de penser à Faber et Mazlish », et la solution qui me vient alors à l’esprit fonctionne à chaque fois pour calmer la situation… Il m’est souvent arrivé (avec leur accord) de démontrer l’efficacité de la méthode à des amis (ou à des personnes de la famille) lors de moments difficiles avec leurs enfants… mais au final, j’ai envie de la partager à un plus grand nombre de personnes, et je me suis donc décidé à commencer à animer les ateliers.
“Prendre la plume quand le temps est passé,
que l’eau a coulé sous les ponts de la vie.
Qu’est-ce que la mémoire conserve?
Que reste-t-il de ces ateliers?
Des rires,
le rire joyeux de ces femmes venues d’autres continents, de pays si lointains,
d’âges variés,
qu’il fut merveilleux de découvrir que face à l’enfant, aux fratries,
face à l’amour –
toutes réagissent de la même manière,
cultivent les mêmes doutes,
reproduisent certains schémas reçus en héritage, vivent les mêmes difficultés.
Cela se livre dans un espace de paroles, bienveillant.
Il reste le souvenir de ces jeux actifs effectués à 2 ou 3 où, mis à
la place de l’enfant, la mère perçoit ce qu’il ressent, qu’elle le vit
dans sa chair, elle comprend l’inutilité de certaines rengaines
qu’elle récite en boucles par habitude, lassitude ou fatigue.
Il reste cette prise de conscience majeure que seul notre regard
modifie la donne.
Si l’on change de discours, quitte la menace, l’enfant instantanément
réagira positivement,
que les mots véhiculent une charge émotionnelle forte et qu’il est
nécessaire de les manier avec soin, user de positivité et de
reconnaître les sentiments de chacun.
L’exploration se fait de manière ludique,
changer implique de s’écouter, chercher la fantaisie, improviser
autrement et s’amuser avec cette approche nouvelle dans l’éducation
même si les vieux réflexes perdurent, reviennent au galop parfois…
Évidemment qu’il paraît souhaitable que les femmes puissent se revoir
avec régularité et sur le long terme pour s’assurer que les
changements s’opèrent et qu’elles se soutiennent mutuellement.
Car isolées et seules, elles peuvent abandonner, tout simplement.
Voilà ce que je souhaitais apporter comme témoignage.”
Bien à vous Marie Aubert, Maman de Zoé (19), Lou (15) et Oscar (14) Chiller
(Participantes aux ateliers “Frères et soeurs sans rivalité”)
Article de Mathilde Jallu, professeur des écoles, maître formateur, Saintes (17)
Cet article doit paraître dans les Cahiers pédagogiques en 2019
Quel enseignant n’a pas rêvé d’avoir un climat de classe serein ? Des élèves motivés par les apprentissages et ayant une bonne estime d’eux-mêmes ? Et si nos comportements, malgré nos bonnes intentions, créaient l’effet inverse ?
« Ah ! ce n’est rien, ça va passer … », « Ne pleure pas, ce n’est pas grave ! ».
Autant de phrases que nous énonçons naturellement, au quotidien, avec même parfois un peu d’agacement dans la voix. Face aux émotions exprimées par nos élèves, nous nous sentons souvent démunis et sommes alors maladroits dans nos échanges.
Il y a deux ans, en tant que conseillère pédagogique, j’ai pu observer dans ma circonscription un accroissement de situations conflictuelles liées à un manque de communication entre enseignants et élèves mais aussi entre adultes. J’ai alors proposé des animations pédagogiques où on puisse travailler concrètement des modes de communication plus satisfaisants pour le mieux-être de tous. Afin d’être épaulée pour préparer et mener ces temps, j’ai collaboré avec une psychologue scolaire de la circonscription.
La formation que nous proposons s’appuie sur la méthode Faber et Mazlish – Parler pour que les enfants apprennent¹ qui invite, dans un premier temps, à nous interroger sur notre façon de communiquer avec les enfants pour ensuite proposer des façons d’agir permettant de gérer différemment les échanges.
Ce travail s’articule autour de six animations pédagogiques étalées sur deux ans.
Lors de la première rencontre, je précise rapidement que ma collègue et moi-même n’intervenons pas en tant qu’expertes qui auraient des « réponses » à apporter. Notre rôle est de présenter un certain nombre de façons de faire. A chacun ensuite d’utiliser celles qui lui conviennent le mieux ; ces quelques mots détendent l’atmosphère.
Pour débuter, une situation mettant en scène un enfant et un adulte fait sourire les enseignants puisque chacun s’y retrouve plus ou moins :
L’enfant : « Je ne sais pas quoi écrire. C’est trop dur ! »
L’adulte : « Mais, si tu sais. Arrête de te plaindre et dépêche-toi !»
Au quotidien, il nous arrive très souvent de nier ainsi les émotions des élèves sans nous en rendre compte, et cela engendre des relations conflictuelles néfastes pour les apprentissages.
Cette première rencontre est l’occasion d’apprendre à accueillir les émotions des élèves. Plusieurs outils sont présentés et testés au travers de jeux de rôles.
Lors de la seconde rencontre, certains enseignants font part de leur surprise face à l’efficacité de certaines réactions. Une enseignante raconte : « Un matin, j’étais très en retard pour partir travailler. Mon fils s’y était pris au dernier moment pour mettre ses chaussures et ne parvenait pas à faire ses lacets. Au lieu de laisser éclater ma colère, j’ai simplement verbalisé ce qu’il devait ressentir : « c’est agaçant ses lacets qui ne se mettent pas comme il faut ». Il a acquiescé en disant qu’il prendrait du temps ce week-end pour s’entraîner et a rapidement noué ses lacets. Nous sommes ainsi partis tous les deux, certes en retard, mais avec le sourire. J’étais fière d’avoir su éviter des tensions aussi facilement».
De même, une autre enseignante partage son expérience : « Pendant les récréations, je n’essaie plus de savoir à tout prix qui est à l’origine du conflit. J’arrête de parler et j’écoute, en acquiesçant régulièrement pour montrer mon intérêt.
Cette technique me rend service car elle économise de l’énergie. L’élève a été écouté et je n’ai pas eu à chercher qui avait commencé le premier. Avant, je voulais toujours à apporter une solution immédiate aux élèves qui venaient me voir. J’avais l’impression que c’était mon rôle, qu’ainsi je leur montrais ma considération. Mais c’était chronophage et épuisant. Maintenant, je les écoute simplement pour comprendre leur besoin ».
Malgré ces expériences positives, chacun évoque la difficulté à changer ses habitudes.
D’autres expliquent que le soir, ils repensent à leurs paroles de la journée et cherchent des formulations plus empathiques. C’est un premier pas. Ma collègue et moi sommes là pour dédramatiser et témoigner de nos essais, de nos réussites mais aussi des difficultés rencontrées.
L’empressement de certains à confier leurs vécus, leurs questionnements montre le réel besoin d’un espace de parole. Ces temps-là sont rares dans la profession, voire inexistants, pourtant le besoin est bien présent.
La troisième rencontre de l’atelier a pour thème la punition. Les enseignants avaient exprimé leur hâte d’aborder ce sujet souvent tabou. Beaucoup ne savent pas comment gérer leurs émotions lorsqu’un élève a dégradé du matériel ou fait mal à un autre. Cela entraîne souvent des punitions qui ont pour objectif de rabaisser l’élève pour calmer la colère de l’adulte.
Les outils proposés par Faber et Mazlish, tels qu’offrir un choix ou réfléchir aux émotions des autres amènent l’enfant à chercher une façon de s’amender, parce qu’on lui montre qu’on le respecte et qu’on souhaite le responsabiliser. C’est ainsi que j’expose au groupe une situation récente dans laquelle un élève avait volontairement arraché un affichage dans le couloir. Au lieu de le punir, l’enseignante lui a demandé ce que pourraient ressentir, en voyant cela, les élèves qui avaient affiché ce travail. L’élève a tout de suite dit qu’ils seraient sûrement en colère et tristes. Il a alors proposé de réparer avec du ruban adhésif. Cette réparation proposée par l’élève lui-même a permis de restaurer son estime aux yeux de l’enseignante.
Lors de l’évaluation de ces temps, les enseignants ont confié se sentir plus armés pour communiquer et souhaitent poursuivre la formation l’année suivante. Car chacun prend conscience du lien entre l’accueil des émotions des élèves et la gestion de ses propres émotions. De même, les enseignants ont compris que les procédures utilisées avec les enfants peuvent l’être également avec les adultes. Certains outils, comme la résolution de problèmes, servent aussi à mieux vivre les rencontres parents/enseignants. Lors d’un entretien qui s’annonçait un peu difficile avec des parents, j’ai fait le choix de les rencontrer sans leur enfant dans un premier temps. Cela m’a permis de leur proposer de faire équipe et de réfléchir ensemble à une façon de favoriser la coopération de leur fils. Cette première partie d’entretien a été décisive ; les parents qui étaient sur la défensive se sont tout à coup sentis valorisés et impliqués. Face à l’enfant, nous nous sommes présentés comme un groupe soudé avec des objectifs similaires.
Apprendre aux enseignants à accueillir les émotions de leurs élèves et à communiquer autrement est essentiel. Cette compétence est plus complexe qu’il n’y paraît, comme nous en faisons l’expérience au quotidien. A l’heure où les parents et la société elle-même attendent de nous un professionnalisme sans faille, y a-t-il une place pour la prise en compte et le bien-être de l’individu ? La réponse serait-elle du côté de la formation initiale et continue ?
¹Editions du Phare, 2016